Dans l’évolution des événements en Libye, trois tendances sont clairement distinguées.
Tout d’abord, il y a un soulèvement spontanné du peuple mécontent de la dictature de Kadhafi et aspirant à l’éliminer. Deuxièmement, dans le sillage de ce mouvement, se soulève une nouvelle élite potentielle qui, en utilisant le mécontentement populaire dans son propre intérêt, compte prendre la place de Kadhafi, « entrer au paradis sur le dos des autres ». Ces deux tendances ont eu lieu dans toutes les « révolutions de couleur », ainsi que dans la révolution soviétique libérale en 1986-1993, la fameuse « perestroïka » (restructuration), qui était en fait, la première révolution de couleur. Comme dans toutes les « révolutions de couleur », la nouvelle élite prône l’idéologie libérale du « marché libre ». Des conséquences d’une telle idéologie peuvent être observées, par exemple, en Russie : depuis 1992, la population y décroit rapidement en dépit de l’immigration, et où une partie importante de la population n’est prête à tolérer le gouvernement actuel que par crainte d’une répétition des « folles années 90 ». D’autre part, tant que le peuple est socialement actif et sent sa force, il y a toujours la possibilité de transformation d’une « révolution de couleur » en vraie révolution sociale. Celle-ci brisera l’ancien ordre fondé sur l’inégalité, l’exploitation, la subordination à l’Etat, et engendrera une société fondée sur l’égalité, l’entraide, la participation collective dans la production, la consommation et la gestion. Même si cela n’arrive pas, même si la révolution ne va pas au-delà de celle de « couleur », tant que le peuple reste actif et sent sa puissance, le pouvoir est obligé de tenir compte de la volonté de la population (à titre d’exemple, on peut mentionner l’URSS en 1990-1991). Cependant, outre les deux tendances évoquées ci-dessus, dans l’évolution libyenne, il y en a une troisième : c’est l’intervention des pays de l’OTAN.
Sarkozy et ses alliés ont besoin d’une petite guerre victorieuse. Ils tentent, grâce à celle-ci, de tuer deux oiseaux avec une pierre. Tout d’abord, à établir un contrôle sur la révolution en Libye, pour ne pas le laisser aller au-delà des « révolutions de couleur », à imposer à la Libye des valeurs libérales. Deuxièmement, ils tentent d’éteindre le mouvement révolutionnaire dans leurs propres pays, à détourner leurs propres citoyens de la lutte des classes, en tournant leur attention vers l’« ennemi extérieur ». Cette guerre, comme toutes guerres sous le capitalisme, est bénéfique pour les capitalistes : ils tirent des bénéfices du commerce du pétrole, des armes, de la restauration de l’économie brisée — en un mot, ils tirent de la guerre de nombreux profits. La guerre n’a aucun avantage pour les gens ordinaires : leur argent est utilisé pour mener la guerre et leur mécontentement est étouffé sous prétexte de « l’unité nationale face à un ennemi commun ».
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