Tribunal incompétent : 17 prévenus en liberté Les 17 militants « No border », poursuivis pour séquestration devant le tribunal correctionnel après leur occupation d'un bâtiment du ministère de la justice, ont été remis en liberté hier soir. Après plus de deux heures d'audience, le tribunal s'est finalement déclaré incompétent (DNA de samedi et dimanche).
-------------------------------------------------------------------------------- Il est près de 16 h lorsque les dix-sept prévenus entrent dans la salle d'audience et s'installent, un à un. Mines sombres et sanglots, les militants et militantes sont visiblement marqués par leur nuit passée à la maison d'arrêt de Strasbourg. Tous déclinent leur identité et leur activité à la présidente du tribunal. Huit étudiants, dont deux thésards, quelques chômeurs, une ouvrière agricole ou un informaticien... avec, pourtant, un point commun : pas de casier judiciaire. Vendredi, ils ont investi les locaux d'une annexe du ministère de la justice, rue Gustave-Adolphe Hirn, où se trouvaient encore trois employés, pour réclamer de meilleures conditions de détention pour Ahmed, l'un des leurs. « On n'avait aucun intention belliqueuse. C'était symbolique. S'ils voulaient sortir, les employés pouvaient le faire », raconte une jeune fille, surveillante dans un lycée. « Mais quand l'employée a voulu sortir, elle n'a pas pu », rétorque alors la présidente Fabreguettes. « On craignait pour notre sécurité, les policiers attaquaient la porte, il y avait des étincelles. Et la porte de secours était bloquée », argumente un autre. Pourtant, l'ambiance reste « bon enfant », selon le prévenu suivant, âgé de 24 ans, qui explique que les occupants ont... offert du chocolat à leurs otages. Quatre mois requis
Des propos peu au goût du procureur Philippe Vannier, qui a dénoncé des « débats surréalistes ». « L'annexe, n'est pas un hall de gare, on n'y entre pas comme ça », a-t-il indiqué lors de ses réquisitions, avant de dénoncer le « chantage » exercé par les prévenus. « Et quand l'employée a voulu sortir, elle n'a pas pu », tranche-t-il, avant de réclamer 4 mois de prison, dont 1 ferme, pour l'ensemble des militants. Les deux avocats de la défense se sont appuyés sur le code pénal, cherchant une faille qu'ils ont finalement trouvée. En effet, pour qu'une affaire de séquestration soit jugée en correctionnelle, il faut que les otages aient été libérés volontairement. Or, durant cette occupation, c'est la police qui a libéré les otages. Et dans ce cas de figure, le délit se transforme en crime et les prévenus doivent être jugés aux assises. « On ne peut pas faire n'importe quoi contre la loi », argumente Me Massiot. Des propos repris par son confrère Me Orounla : « si la libération n'est pas volontaire, c'est un crime. Là, on a un dossier spectaculaire, mais il ne repose sur rien. »
Aux assises ?
Le tribunal a finalement suivi cette argutie juridique en se déclarant incompétent pour juger de cette affaire... qui a été renvoyée au parquet. Reste à connaître la décision du ministère public, qui peut aussi bien décider d'un classement sans suite, que d'une ouverture d'information avec un éventuel renvoi devant les assises. En attendant, la nouvelle a été reçue avec satisfaction devant le palais de justice par la vingtaine de manifestants venus soutenir leurs camarades.
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